Mercredi 21 novembre, SABELAURE est prêt, moi aussi, enfin je le croyais… L’objectif est de rejoindre le sud au plus tôt pour pouvoir naviguer tout l’hiver. Je suis sorti de Granville à midi, le seuil le permettait, destination Saint Cast le Guildo. Vent de SW 25nd, houle d’WNW d’un bon 2m. J’envoie la GV à 3 ris, premier soucis en hissant je m’aperçois qu’il faut sortir les 3 derniers coulisseaux, je gère. Le pilote m’a déjà abandonné deux fois, en butée il ne barre plus. Je hisse le solent, je n’arrive pas à le border, les écoutes sont dans les haubans, je pense que je ne les ai pas passées du bon côté des haubans, je les déplace et je recommence. J’arrive sur le Videcoque, il est temps de virer. Je lance la manœuvre sur le pilote. Une rafale à 30 nds, une vague un peu plus méchante, le pilote se décroche de son support. Je saute sur la barre, le solent emmène les écoutes qui s’emmêlent. J’affale, je démêle, même le nerf de chute s’est emmêlé dans les haubans, je prends le ris du solent. Le vent commence à se calmer, c’était prévu, la houle aussi je me suis éloigné de Granville. Je retourne dans le cockpit pour hisser à nouveau et je vois que l’antenne VHF pend le long du mat. Ce n’était pas le jour… Il est 14H, moteur, demi-tour vers Granville. 14H45, le bateau est amarré. Rodage musclé qui a permis de mettre rapidement en évidence les petits défauts et surtout la difficulté à gérer tous ces soucis seul avec une telle météo. Autre enseignement, expliqué le lendemain par Johan, quand la mer est ainsi formée les granvillais tire un premier long vers le Sud et non vers le nord comme je l’ai fait. Je n’aurais pas pris la houle en pleine face sur la zone ou elle est la plus dure. Déçu d’être rentré mais très heureux de cet apprentissage rapide sans danger. La capitainerie me donne une place sur un ponton moins exposé en prévision du coup de vent prévu pour la nuit et le lendemain.

Jeudi 22, Johan fixe plus solidement l’antenne, la voilerie rĂ©pare le coinceur du nerf de chute du solent dont un rivet avait sautĂ©, je trouve la solution pour le pilote ne se dĂ©croche plus, je raccourci les Ă©coutes du solent (Eric les avait fait longues car c’était une fin de bobine) et Ă  l’abri du vent je peux Ă©tudier calmement le chemin de mes Ă©coutes de solent et dĂ©terminer le point optimal sur le chariot d’écoute. Le BMS en cours est prĂ©vu jusqu’à 6H vendredi matin, heure Ă  laquelle le seuil sera largement suffisant pour sortir. Objectif selon l’allure, le Trieux, Saint Quay Portrieux ou St Cast. 5H rĂ©veil difficile, ça a soufflĂ© fort et il beaucoup plu durant la nuit. Il pleut encore mais tout Ă  l’air calme. Je quitte le ponton, range les amarres, les pare bates et prĂ©pare la GV avant de sortir du port. Je passe le musoir, calme plat et pluie. Je hisse la GV entière, la borde, cale le pilote au 266°, prend la tĂ©lĂ©commande du pilote et me poste Ă  l’avant pour guetter les casiers. A 8H30 le jour se lève, le vent aussi, 6/8nd SW et la pluie cesse, super ! J’envoie le gĂŞnois et me voici parti pour 3 belles heures sous voiles entre 4,5 et 5 nd. Vers 11H45 Ă  l’approche du cap FrĂ©hel le vent faibli, ne sait plus bien s’il veut rester SW ou monter W, Ă  peine 3nd au speedo. Je suis Ă  mi distance entre la cĂ´te et les Minquiers. Je roule le gĂŞnois, moteur Ă  5 nd et en route pour St Quay. Tant pis si je fais le reste de la route au moteur, j’avance. Plus tard quand je ne serais plus poussĂ© par la course vers des tempĂ©ratures ambiantes confortables et obligĂ© de ne naviguer qu’un jour sur trois entre les coups de vents je ferais ce que je pourrais Ă  la voile. Je fais ma nav Ă  l’ancienne sur la carte, mais j’avoue que j’ai vite pris goĂ»t Ă  la cartographie. Gros gain de rĂ©activitĂ© pour corriger la route en fonction des courants. La dĂ©tection AIS et le « Mer Veille Â» sont bien pratiques aussi. Cette journĂ©e me permet de prendre en main tranquillement tout ce nouveau matĂ©riel. 17H45, pile Ă  la tombĂ©e de la nuit je m’amarre ponton 7 Ă  St Quay. Très content. Je consulte la mĂ©tĂ©o, avis de coup de vent samedi et dimanche, force 4 rafales Ă  6 lundi et Ă  nouveau coups de vent après.

Samedi matin, il pleut, il fait froid et le bulletin météo n’est pas plus généreux que la veille. C’est décidé, je ne reste pas deux jours ici à attendre pour ne pouvoir naviguer qu’une seule journée, ce serait une vraie punition, avec l’éventualité que ça se corse pour lundi au fil des bulletins. Je range le bateau, je double les amarres, je lave le pont à l’eau de mer (avec ce qu’il tombe il va être vite rincé). Je file à la capitainerie les prévenir de mon escale prolongée, appel un taxi, à 13H je monte dans le train à St Brieuc. Suite à partir du lundi 3 décembre.

En rentrant je trouve un mail via une bourse d’équipiers me proposant de naviguer en Méditerranée durant l’hiver. La météo continue à être pénible en Bretagne Nord, le scénario est toujours le même, je dois admettre que je n’arriverai pas à quitter la Bretagne. C’est décidé, je ramène le bateau à Granville et je le fais sortir de l’eau.

Lundi 10 décembre, Je suis arrivé la veille. Je décolle à 8h45, obligé d’attendre l’ouverture de la capitainerie pour payer la place. Après un long bord de près de 10H à 5 nœuds de moyenne j’affale mes voiles, de nuit, juste à l’entrée du port de Granville, super journée. Déçu d’avoir fait demi tour, mais content de cette belle nav et pressé de retrouver mon bateau.

Mardi matin SABELAURE est sorti de l’eau, j’ai rentré les voiles et la capote de roof, rangé les écoutes, suspendu les drisses… Il est prêt à passer l’hiver.